François Bayrou invité du 20h de TF1
Le Premier ministre François Bayrou était l'invité de Gilles Bouleau ce mercredi 27 août sur le plateau du 20h de TF1.
Gilles Bouleau : Bonsoir Monsieur le Premier Ministre.
François Bayrou : Bonsoir.
Gilles Bouleau : Merci d'avoir accepté notre invitation. Lundi, vous avez surpris tout le monde en annonçant que vous alliez vous soumettre, vous et votre gouvernement, à un vote de confiance à l'Assemblée nationale. Il aura lieu le 8 septembre. Si on regarde les rapports de force dans l'hémicycle, ça s'annonce très très compliqué. Regardez.
[Diffusion d’un reportage]
Gilles Bouleau : Vous avez vu ces chiffres, ils ne mentent pas. Aujourd'hui, nous sommes à 12 jours de ce vote. Vos chances d'obtenir arithmétiquement la majorité sont aujourd'hui nulles.
François Bayrou : En apparence. Mais est-ce qu'on peut préciser une chose ? Parce que tout le monde a dit, et votre reportage aussi, un « vote de confiance ». Alors on appelle ça comme ça. Mais la précision, c'est que c'est une déclaration de politique générale dans laquelle, ou par laquelle, le gouvernement s'adresse à l'Assemblée nationale en lui disant « voilà la situation et voilà notre volonté ». Et c'est sur ce bilan de la situation, ce constat de la situation, que les députés doivent voter. Et est-ce que cette situation est réelle ? Est-ce que c'est grave ? Et est-ce que c'est urgent ?
Gilles Bouleau : Certes, mais sur l'arithmétique, ça ne change rien.
François Bayrou : Non, ça ne change rien.
Gilles Bouleau : Il y aura peut-être votre pouvoir de conviction, mais on va en reparler dans un instant. Arithmétiquement, ça ne change rien. Aujourd'hui, vous ne pouvez pas obtenir cette confiance ?
François Bayrou : Non, aujourd'hui, a priori, on ne peut pas obtenir la confiance, mais on sait bien qu'il n'y a pas de majorité depuis longtemps, depuis les élections. La question, elle est simple. Ma conviction, c'est qu'il est impossible de poursuivre ou de porter la politique de redressement du pays s'il n'y a pas un minimum d'accord sur l'importance de ce choix. Parce qu'on ne peut pas passer en force, et d'ailleurs je ne veux pas passer en force. Le gouvernement, dans ce moment, il n'est pas contre les Français, ou pour contraindre les Français. Le gouvernement, il est le défenseur des Français.
Gilles Bouleau : Oui, monsieur le Premier ministre, mais il y a deux parties clés, ceux qui pèsent le plus : le Parti Socialiste, le Rassemblement National. Jordan Bardella, ici même hier, a dit que jamais, jamais, les députés du RN ne voteraient la confiance pour vous et votre gouvernement. Le premier secrétaire du Parti Socialiste, avant-hier, dans ce journal, disait qu'il était inenvisageable qu'il vote la confiance en votre faveur. Vous êtes bloqué, vous êtes dans une impasse.
François Bayrou : Je répète que « confiance » n'est pas le bon mot. Le vote qui va être émis est un vote pour que les parlementaires disent si oui ou non ils partagent le constat.
Gilles Bouleau : Aujourd'hui, ils disent non.
François Bayrou : D'abord, rien que les phrases que vous avez énoncées sont intéressantes. Voilà que vous allez avoir LFI, le Rassemblement National, et le Parti Socialiste qui vont, ensemble - alors qu'ils sont absolument antagonistes sur tous les sujets, ils sont directement opposés les uns aux autres, y compris avec des insultes de tous les jours. Et c'est cet assemblage-là qui dit « nous allons renverser le gouvernement ». Est-ce que c'est bien pour la France ?
Gilles Bouleau : Mais cela ne peut pas vous surprendre, c'est la règle du parlementarisme. Vous ne débutez pas dans cette carrière, monsieur le Premier ministre.
François Bayrou : Ceci est tout à fait vrai, mais peut-être on peut essayer de voir la gravité des choses. Oui ou non, est-ce que la situation de la France, la menace de surendettement, est-ce que cette situation mérite qu'on y réponde ? Alors on a, c'est très simple, c'est comme un bateau qui aurait une voie d'eau, un trou dans la coque et la coque se remplit d'eau. Alors il y a des gens qui disent, « t'en fais pas Simone, le bateau flotte encore ». Et de ce point de vue-là, on est irresponsable. Et on n'est pas irresponsable pour nous, M. Bouleau, même pas pour vous, pas pour nous, pas pour notre génération. On est irresponsable pour les plus jeunes des Français. Vous vous rendez compte, on a réussi un truc, je trouve que ça sera dans les livres d'Histoire. Le pays est écrasé sous la dette. Et vous savez bien que c'est vrai, vous avez fait 1000 reportages sur le plus.
Gilles Bouleau : 3 300 milliards de dettes.
François Bayrou : 3 300, presque 50 milliards de dettes. Le pays est écrasé sous la dette. Ça lui coûte, ça lui enlève chaque année une part essentielle de ce qu'il produit et de ce qu'il vit. Et on dit : c'est pas grave, les partis politiques vont voter contre. Je vous donne deux chiffres… pardon, je ne veux pas vous interrompre.
Gilles Bouleau : Je vous en prie.
François Bayrou : Je vous donne deux chiffres. Le pays produit chaque année 50 milliards de richesses de plus que l'année précédente. 50 milliards. Et avec ces 50 milliards, on fait 150 milliards de déficits supplémentaires. Ça mérite ne pas que TF1, que le journal de 20 heures, que Gilles Bouleau, disent : mais enfin, il se passe quelque chose qu'on ne peut pas accepter !
Gilles Bouleau : Monsieur le Premier ministre, il faut parler de votre méthode. Aujourd'hui, enfin, aujourd'hui, vous avez appelé les représentants des partis d'opposition, qui ne sont pas de votre parti, à venir vous voir à Matignon pour consultation à partir de lundi. Mais pourquoi ne l'avez-vous pas fait avant ?
François Bayrou : Parce qu'ils étaient en vacances.
Gilles Bouleau : Mais ils avaient un numéro de téléphone, ils ont une adresse e-mail. Madame Le Pen dit qu'elle vous a écrit une lettre au mois de juillet à laquelle vous n'avez pas répondu. Les représentants du Parti Socialiste disent que vous ne répondiez pas à leur invitation.
François Bayrou : Ceci est quand même drôle.
Gilles Bouleau : Je ne dis pas que c'est vrai, c'est ce qu'eux disent.
François Bayrou : Écoutez, on ne va pas passer son temps à dire qu'est-ce que vous faisiez au mois d'août, parce qu'au mois d'août, ils étaient tous en vacances. Et que j'ai, d'une manière ou d'une autre, échangé directement ou par intermédiaire avec les uns ou les autres. Mais il y a une chose très simple. Si vraiment cette question de discuter ensemble est ouverte, je les reçois à partir de lundi.
Gilles Bouleau : Sauf que là, le temps presse.
François Bayrou : Non, non. Il reste 12 jours. Et 12 jours, c'est très très long pour parler. J'ai dit une chose simple. Nous n'avons pas ouvert de négociations parce qu'il y a une question à poser avant les négociations. C'est est-ce qu'on est d'accord sur la gravité et sur l'urgence des choses. Et si on est d'accord sur la gravité et sur l'urgence des choses, alors on ouvre des négociations, on a un mois après, avant la présentation du budget. On a tout à fait le temps de regarder les choses, et j'ai dit que j'étais prêt à examiner, mesure par mesure, comme on dit, décision par décision, la totalité de ce que nous avons annoncé.
Gilles Bouleau : Nous y venons. Pour que les choses soient claires, ça va concerner les Français qui nous regardent. Êtes-vous prêt à négocier, à trouver un compromis sur des mesures très simples : les deux jours fériés que vous voulez supprimer, l'année blanche en 2026 ou la hausse de l'imposition des plus hauts revenus. Est-ce que ce sont des thèmes concrets sur lesquels vous êtes prêts à lâcher du lest ?
François Bayrou : Sur tous les sujets, je suis prêt à discuter, sauf sur un. C'est l'effort qu'on doit faire pour que la France choisisse la trajectoire de sortir du surendettement. Cet effort est conséquent. Je répète, on produit 50 milliards de richesse chaque année nouvelle et chaque année nous augmentons le déficit de 150 milliards. Quelle famille, quelle entreprise, quel garage ou quelle association peut réussir à vivre en créant chaque année trois fois plus de déficit qu'il n'a de ressources ?
Gilles Bouleau : Mais…
François Bayrou : Ne dites pas mais !
Gilles Bouleau : Ces partis ne disent pas que vous dites faux, monsieur le Premier. Ils disent juste que la méthode de François Bayrou, ce qu'il veut appliquer n'est pas bon. C'est mauvais pour la France. Ils ne disent pas que vos 44 milliards n'existent pas.
François Bayrou : Chacun prendra ses responsabilités. Si on s'accorde sur les 44 milliards que vous énoncez, vous venez de dire une phrase importante. 44 milliards, c'est probablement un seuil. Alors un certain nombre d'entre eux le nie. Un certain nombre d'entre eux dit, non, il faut moins économiser. Il faut dépenser plus. Comme si le déficit, duquel on va essayer de sortir, n'était pas une menace. Et le déficit, il est de menace pour qui ? Pour les plus faibles du pays. Ceux qui vont trinquer, une partie de ceux qui nous écoutent, c'est ceux qui sont dans la difficulté, ce sont les femmes seules avec enfants, et c'est les plus jeunes.
Gilles Bouleau : Sur ce chiffre de 44 milliards, monsieur le Premier ministre, la porte-parole de votre gouvernement, ce matin, sur TF1, disait que 44 milliards, c'est une base au départ, on peut négocier. C'est aussi votre avis, est-ce qu'on pourrait réduire de 35 ou 40 ou de 38 milliards 5 la dépense publique plutôt que d'aller vers le chaos ? Ce n'est pas votre idéal mais ce serait un terrain d'entente ?
François Bayrou : Je ne suis pas en train de marchander.
Gilles Bouleau : Donc c'est tout ou rien, c'est 44 milliards ou rien ?
François Bayrou : Non, je ne vous ai pas dit ça. Je dis une chose simple : est-ce qu'on s'accorde sur la gravité et sur l'urgence ? Est-ce que c'est vrai ce que je dis ? J'ai plusieurs fois lancé le défi à mes opposants de venir défendre une position contraire. Pour l'instant, je n'en ai pas entendu. La situation du pays, elle s'aggrave chaque année de manière insupportable. On avait 30 milliards à rembourser tous les ans. 30 milliards, je rappelle, ça fait 30 000 millions d'euros. On avait 30 milliards à rembourser, on est passé en 2 ou 3 ans à plus de 60 milliards, on va atteindre 75, et la Cour des comptes dit plus de 100 milliards en 2029.
Gilles Bouleau : Personne ne nie ce constat, monsieur le Premier ministre.
François Bayrou : Si.
Gilles Bouleau : Non…
François Bayrou : Je regrette infiniment.
Gilles Bouleau : …pas dans la question que j'allais vous poser dans un instant.
François Bayrou : Gilles Bouleau, si personne ne nie ce constat. Alors il y a une question à poser qui fait un pas de plus, qui est : est-ce qu'on fait ce qu'il faut pour en sortir ou pas ?
Gilles Bouleau : Certains veulent trouver d'autres méthodes que la vôtre.
François Bayrou : Non, il n'y a pas d'autres méthodes.
Gilles Bouleau : Mais même le président de la République ce matin, en conseil des ministres, vous y étiez bien évidemment, est moins catastrophiste que vous. Il ne dit pas 44 milliards, c'est intangible, je ne bougerai pas d'un centimètre. On a le sentiment que si c'est lui qui négociait et pas vous, cela pourrait être 38, 37 milliards mieux que le chaos qui possiblement se présente à nous. Je surinterprète ce qu'il dit.
François Bayrou : Oui, un tout petit peu.
Gilles Bouleau : Mais il est moins catastrophiste que vous.
François Bayrou : Non, il a dit qu'il ne faut pas dissimuler les atouts de la France. Ils sont très grands. Mais nous sommes en train de brûler l'un après l'autre tous les atouts que nous avons, parce que la richesse du pays, elle part à ceux dont 60% sont à l'étranger, qui nous ont prêté de l'argent. On va vers deux catastrophes et peut-être trois. La première, c'est l'explosion des taux. Vous avez vu le reportage que vous avez présenté il y a cinq minutes sur ce jeune homme qui veut acheter un appartement ou une maison. Et votre reporter a dit, mais autrefois c'était beaucoup plus facile. Pourquoi c'est difficile de plus en plus ? Parce que les taux d'intérêt montent. Et vous savez bien pour vous-même que ceci est une difficulté. Et pour les entreprises, pour investir dans l'entreprise et pour les associations, enfin pour tous ceux, familles et organisations, qui ont besoin d'emprunter de l'argent. Et donc, ça c'est la première difficulté. Il y a une deuxième difficulté qui est plus grave et que les Anglais ont rencontré il y a très peu d'années, il y a deux ans ou deux ans et demi, c'est quand vous ne trouvez plus de prêteurs.
Gilles Bouleau : Ce qui a amené la démission de la première ministre éphémère.
François Bayrou : En six semaines. Et c'est l'Angleterre, c'est la Grande-Bretagne, c'est le Royaume-Uni, c'est un grand pays et c'est un grand pays financier. En six semaines, le gouvernement a été obligé de partir. Je ne veux pas accepter la fatalité de ce genre de crise.
Gilles Bouleau : Et donc vous êtes prêt à faire des efforts, des compromis pour débloquer la situation en tendant la main aux partis politiques ? Jusqu'où concrètement êtes-vous prêt à aller avec les représentants du Parti Socialiste, du Rassemblement National et d'autres ?
François Bayrou : Je vais recevoir...
Gilles Bouleau : C'est lundi, c'est très bientôt.
François Bayrou : Je vais recevoir les responsables de partis politiques et de groupes parlementaires, je vais examiner les choses avec eux, mais je dis que la condition préalable, c'est qu'on s'entende sur l'importance de l'effort. Et pour tous ceux qui nous écoutent, la question c'est est-ce que c'est vrai ou est-ce que c'est pas vrai ? Est-ce que ce que François Bayrou nous dit, il exagère ? Eh bien, je demande qu'on regarde et que tous ceux qui, dans le pays, ont une responsabilité universitaire ou économique, qu'ils disent si c'est grave ou pas. Je prétends que lorsque la France est le pays d'Europe qui a presque le plus d'endettements, sauf un, et qui a le plus d'impôts, je prétends que ce pays est au risque. Et la seule chose qui m'intéresse, c'est que ceux qui nous écoutent prennent conscience de cette affaire. On ne peut rien faire sans les Français. On ne peut rien faire sans eux et on ne peut rien faire contre eux. C'est la raison pour laquelle, alors que tous les Français pensent que les hommes politiques, ce qu’ils veulent c’est durer, c'est rester à leur place, c'est profiter des privilèges… C'est la raison pour laquelle j'ai pris ce risque en disant c'est suffisamment grave pour que je vous dise, le gouvernement engage sa responsabilité. S'il est suivi, on ouvrira toutes les négociations nécessaires. S'il n'est pas suivi, il tombera. Mais nous aurons dit aux Français, sans la moindre ambiguïté, que c'est la vie de la nation qui est en jeu.
Gilles Bouleau : Donc les Français, on voit bien que vous voulez passer peut-être par-dessus les partis, et en appeler aux Français, à leur sagesse, à leur sens des responsabilités, nous leur avons posé la question. Regardez les résultats de ce sondage IFOP réalisé pour LCI. 63% des Français sont favorables à une dissolution de l'Assemblée nationale. Et nous sommes allés également à Châteaudun, en Eure-et-Loir, une commune qui a voté très précisément comme les Français au premier tour d'élection présidentielle de 2022. Écoutez la réaction des habitants.
[Diffusion d’un reportage]
Gilles Bouleau : Ils sont perdus, ils sont déboussolés.
François Bayrou : Non non, ils ont dit des choses…
Gilles Bouleau : Ils ne comprennent pas forcément ce que vous voulez.
François Bayrou : C'est pour ça que je suis avec vous et que vous m'avez invité.
Gilles Bouleau : Tout à fait.
François Bayrou : Mais vous voyez, ils ont dit des choses absolument essentielles. Ils ont dit nous sommes inquiets parce que cette incapacité du monde politique à saisir la gravité de la situation, pour eux c'est un motif d'inquiétude. Et ils disent une deuxième chose : ils disent on veut de la stabilité. On entre dans un temps avec les annonces de tous ces partis qui sont ennemis entre eux, même pas seulement, opposés entre eux, ennemis entre eux, et qui disent « mais nous allons faire tomber le gouvernement ; d'un cœur léger, on va faire tomber le gouvernement ». Et les Français, ils disent « mais ça, c'est une menace pour nous ». Je ne cherche pas à tirer votre reportage. Nous n'en avions pas parlé avant, heureusement. Mais c'est exactement ce que les Français de Châteaudun et d'ailleurs disent. La question ou la condition pour avoir de la stabilité, c'est que les Français eux-mêmes prennent conscience. Les partis politiques qui ont dit on va faire tomber le gouvernement, je suis persuadé que dans les 12 jours qui restent, ils peuvent dire bon, on a parlé peut-être un peu vite, on est peut-être allé un peu loin. Puisqu'on va discuter, puisque les discussions peuvent s'ouvrir, à ce moment-là, on verra après. Qu’ils conservent l'arme de dire non, puisque c'est le Parlement et les partenaires sociaux qui vont intervenir dans ce débat.
Gilles Bouleau : Mais monsieur le Premier ministre, si vous n'avez pas la majorité le 8 septembre prochain, vous démissionnerez, vous n'aurez pas d'autre choix que de démissionner. Si d’aventure…
François Bayrou : C’est la Constitution.
Gilles Bouleau : La Constitution l'autorise également, Emmanuel Macron, président de la République, souhaite vous renommer à Matignon, est-ce que vous accepteriez ?
François Bayrou : Vous savez, il y avait une chanson qui disait « avec des si, on mettrait Paris en bouteille ». Et vous avez Paris derrière vous, c'est un peu plus grand qu'une bouteille. Je ne crois pas aux ruses. Je pense que le moment où on vit, le moment où le gouvernement dit « nous mettons en jeu l'existence même du gouvernement parce que les choses sont trop graves ». Vous avez entendu l'inquiétude exprimée par les quatre intervenants. Ils ont raison. Et ils ont raison de vouloir de la stabilité. Et la responsabilité du gouvernement est de leur montrer qu'on ne défend rien, on ne défend pas d'intérêt particulier. Nous défendons l'intérêt général.
Gilles Bouleau : Si vous êtes contraint de démissionner, que rien ne change, que tout se bloque, souhaitez-vous ou pensez-vous inéluctable, comme Édouard Philippe, l'un de vos prédécesseurs à Matignon, pensez-vous inéluctable de dissoudre l'Assemblée nationale ?
François Bayrou : On vient de vivre une dissolution il y a un an.
Gilles Bouleau : Malencontreuse.
François Bayrou : Oui, enfin bon, c'est une décision du président de la République qui a voulu clarifier les choses.
Gilles Bouleau : Faut-il à nouveau dissoudre ?
François Bayrou : Est-ce qu'une dissolution nouvelle nous permettrait d'avoir une stabilité, d'avoir une volonté, d'avoir une détermination du pays et de ses gouvernants pour avancer ? Je ne le crois pas. Les exigences de l'extrême droite et de l'extrême gauche sont directement un clash entre elles. Est-ce que ça favorise le pays qu'en additionnant leurs voix, le gouvernement tombe ? Je suis persuadé que non. Et je suis persuadé qu'il y a un grand nombre de parlementaires qui peuvent réfléchir à tout ça en disant : quand même, on est élu pour que l'avenir des Français soit mieux envisagé, mieux organisé. Et si on crée le chaos aujourd'hui, encore une fois, qui vont être les victimes ? Et les premières victimes, c'est les plus jeunes des Français, à qui on a réussi à faire croire, je disais tout à l'heure, ça sera dans les livres d'Histoire, c'est eux qui sont les victimes, c'est eux qui devront payer la dette pendant toute leur vie. Et on a réussi à leur faire croire qu'il fallait encore l'augmenter. Vous ne trouvez pas ça génial ? Tout ça pour le confort de certains partis politiques et pour le confort des boomers, comme on dit, qui de ce point de vue-là considèrent que ma foi, tout va très bien. Je crois, moi, que la lucidité, c'est la première vertu d'une nation et la volonté de s'en sortir.
Gilles Bouleau : Merci beaucoup, monsieur le Premier ministre.